Un clivage est mort, vive le nouveau clivage
Dernière mise à jour le Mardi 28 janvier 2014 09:44 Écrit par Christelle de Crémiers Vendredi 21 décembre 2012 08:17
Le gouvernement Ayrault se défend d’être de droite. Il est de manière récurrente attaqué sur ce point. L’amendement sur le Crédit d’Impôt pour la Croissance et l’Emploi, cadeau pour les entreprises en bonne santé, aurait pu être le projet phare d’un François Baroin, la politique migratoire, celle d’un Claude Guéant. Le vote des étrangers, c’est sûr, ce n’est pas un projet de droite, mais, justement, le gouvernement tergiverse sur cette promesse de campagne, la n°50.
Le ton est donné dès l’intronisation de François Hollande. Aux États-Unis, il prononce plus de 40 fois le mot « croissance ». Car il pense que la croissance est la seule voie vers l’emploi, car les crises à répétition et l’augmentation chronique du chômage n’ébranlent pas sa conviction. Car même Edgard Morin, avec qui il dialogue sous la plume de Nicolas Truong, ne parvient pas à le faire douter. « Je suis un militant du progrès (…) Je suis pour un niveau plus élevé de croissance. » – lui répond-il.
Il est donc logique de tenter de la ranimer avec les mêmes moyens que ceux utilisés par le gouvernement UMP précédent : augmentation de la TVA pour combler la dette, baisse des charges et gel des salaires, cadeaux fiscaux pour augmenter les bénéfices des entreprises, leur « compétitivité », dans l’espoir de les voir embaucher quelques dizaines de milliers de précaires. Espoir vain, comme le montre le taux croissant et désormais chronique des statistiques alarmantes du Bureau International du Travail. Le clivage droite / gauche, entre les tenant de l’accumulation du capital et ceux de la répartition a vécu. Au sein du système capitaliste financier désormais mondial, il n’y a plus qu’une seule politique économique à appliquer, celle de l’austérité. Les crises, que le système lui-même a engendrées, crise climatique, crise des ressources, crise de l’emploi, crise économique et crise des dettes publiques, sont venues à bout d’un clivage qui ne reflète plus le choix qui est réellement proposé aux populations.
Le choix qui se présente aux populations des pays développés, même s’il n’apparaît pas encore comme tel dans l’offre programmatique des partis politiques, est celui du stop ou encore. Stop, on change de système de production, on vise le bilan carbone nul et non plus le profit, on retrouve le plein-emploi grâce à la réduction de la mécanisation et des pesticides, on décide démocratiquement l’abandon ou le développement des activités en fonction de leur empreinte écologique. Encore, on prolonge un système économique inégalitaire jusqu’à épuisement irréversible des ressources, on accepte la misère d’une partie croissante de la population grâce à un gouvernement autoritaire et nationaliste. Le nouveau clivage écolo-démocrate / productiviste-autoritaire ne correspond pas au découpage actuel de l’échiquier politique. À chaque fois, c’est une partie de l’UMP, du PS, de l’UDI, du PG, voire de EELV, qui tranchera dans un sens ou dans l’autre.
Le chemin semble encore très long pour que le nouveau clivage émerge dans le débat public. Le clivage droite/gauche a beau être désormais inopérant, il est un référent culturel fort et partagé. Mais les choix entre écologie et productivisme vont se poser avec une fréquence croissante, le chômage, les problèmes de santé et les catastrophes naturelles se multipliant. Les citoyens, avertis grâce à Internet et aux nombreux media alternatifs et citoyens, ne se laisseront pas voler la prise de décision. Le débat n’échappera pas à la scène publique. Mais cela n’est pas suffisant. Après la crise de 1929, les citoyens avaient le choix entre la sociale démocratie et le fascisme. Ils ont « démocratiquement » voté la dissolution du Parlement et de la démocratie.
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